Ce musée vous donne la nausée dès l’entrée… mais vous en ressortez en ayant changé d’avis sur la nourriture

vendredi 7 novembre 2025 18:00 - Patricia González
Ce musée vous donne la nausée dès l’entrée… mais vous en ressortez en ayant changé d’avis sur la nourriture

Oubliez les vitrines de macarons et les buffets étoilés. À Malmö, en Suède, il existe un lieu qui repousse les limites du goût (littéralement).

Le Disgusting Food Museum, ou musée de la nourriture dégoûtante, est devenu célèbre dans le monde entier pour une raison très simple: tout y sent mauvais, mais tout y fait réfléchir. Ce n’est pas un restaurant, ni une expérience immersive “fun” pour touristes. C’est un voyage sensoriel et culturel au cœur de ce qui nous dégoûte… ou plutôt, de ce que nous croyons dégoûtant!


Un musée qui met tous les sens à l’épreuve

Dès l’entrée, le ton est donné : ici, le billet d’entrée n’est pas en papier… c’est un sac à vomi. Une façon très suédoise d’annoncer la couleur (et l’odeur).

Le musée, fondé par le psychologue et curateur Samuel West, ne cherche pas à faire rire ni à provoquer gratuitement. Il propose une expérience sensorielle complète, qui explore la frontière floue entre ce que l’on considère comme de la nourriture et ce que notre culture nous a appris à rejeter.

Au total, plus de 80 plats venus des quatre coins du monde y sont exposés : certains intriguent, d’autres écœurent, mais tous racontent une histoire.

L’objectif ? Nous amener à réfléchir à nos préjugés alimentaires. Ce que nous trouvons immangeable ici est parfois considéré comme un mets raffiné ailleurs. Et inversement.

Le menu impossible: 80 manières de tester vos limites

Le musée n’a rien d’un concours de courage, même si certains visiteurs le vivent ainsi.

Parmi les plats exposés, on trouve :

Le surströmming, hareng de la Baltique fermenté plusieurs mois, considéré comme un mets traditionnel en Suède. Son odeur ? Un mélange de poubelle et d’œuf pourri si fort que les Suédois l’ouvrent toujours à l’extérieur.

Le natto, plat japonais à base de soja fermenté, recouvert de filaments gluants. Certains disent qu’il sent les pieds, d’autres qu’il est le secret de la longévité nippone.

Le casu marzu, fromage sarde… habité. Oui, il contient des larves vivantes de mouches, censées favoriser la fermentation. Interdit dans l’Union européenne, mais toujours consommé en Sardaigne.

Le hákarl islandais, viande de requin enterrée plusieurs semaines pour éliminer son ammoniaque. Son odeur âcre et sa texture caoutchouteuse en font un rite de passage pour tout Islandais.

Le vin de souris chinois, liqueur médicinale préparée en laissant macérer de jeunes souris dans l’alcool de riz.

Et pour les amateurs d’expériences extrêmes : la liqueur de serpent vietnamienne, le cochon d’Inde rôti du Pérou, ou encore certaines boissons énergisantes mexicaines à base de testicules de taureau.

Certains visiteurs s’amusent à relever le défi de tout sentir, d’autres s’arrêtent dès la deuxième vitrine. Mais tous ressortent avec la même impression : la notion de “dégoûtant” n’a rien d’universel.

Le dégoût, une affaire de culture (et d’habitude)

C’est là tout le message du musée.

Selon Samuel West, “chaque pays a son plat dégoûtant”. Ce qui choque ici peut être une fierté ailleurs.

Prenez le roquefort : pour beaucoup d’étrangers, manger un fromage moisi relève de la folie. Pourtant, en France, on le savoure avec du pain et un verre de vin.

De même, les escargots ou les cuisses de grenouilles font frémir certains touristes, mais sont pour nous des spécialités de terroir.

Le musée ne juge pas : il observe les cultures à travers leurs tabous alimentaires.

Il nous invite à nous interroger : pourquoi un fromage aux asticots nous semble “sale”, alors qu’un saucisson cru est perçu comme normal ? Pourquoi les insectes nous rebutent-ils, alors qu’ils nourrissent un tiers de la planète ?

En d’autres termes : le dégoût n’est pas biologique, il est culturel.

Une expérience entre fascination et malaise

Le Disgusting Food Museum joue sur cette tension. Chaque vitrine mélange humour, curiosité et provocation bienveillante.

Des écrans diffusent les réactions des visiteurs : grimaces, rires nerveux, visages pâles, parfois fuites précipitées. L’odeur omniprésente rend l’expérience encore plus réelle — certains jurent qu’elle s’accroche à leurs vêtements pendant des heures.

Mais au-delà de la blague, il y a une réflexion profonde sur notre rapport à la nourriture.

Dans un monde où l’alimentation durable devient une priorité, où la viande traditionnelle coûte cher à la planète, le musée pose une question cruciale : et si ce que nous trouvons “dégueu” aujourd’hui devenait normal demain ?

Les insectes, par exemple, suscitent encore des grimaces en Europe. Pourtant, leur consommation est encouragée par la FAO comme source de protéines d’avenir. De même, les viandes fermentées ou les substituts végétaux sont en train de redessiner nos habitudes culinaires.

Pourquoi il faut le visiter au moins une fois dans sa vie

Parce qu’on en ressort transformé. Le Disgusting Food Museum n’est pas qu’un cabinet de curiosités : c’est une expérience humaine.

On y apprend que ce que l’on appelle “nourriture” dépend d’où l’on est né, de son éducation, de ses valeurs.

Et qu’en fin de compte, le dégoût est une fenêtre sur notre culture.

Alors, la prochaine fois qu’un plat inconnu vous déroute, avant de dire “beurk”, souvenez-vous : ce qui vous semble inacceptable aujourd’hui sera peut-être une évidence demain.

Et qui sait ? Peut-être qu’un jour, ce sera à votre tour de défendre fièrement… votre fromage qui pue! 

Patricia GonzálezPatricia González
Passionnée par la cuisine et la bonne nourriture, ma vie se divise entre des mots soigneusement choisis et des cuillères en bois. Responsable, mais distraite. Journaliste et rédactrice avec plusieurs années d’expérience, j’ai trouvé mon coin idéal en France, où je travaille en tant que rédactrice pour Petitchef. J'adore le bœuf bourguignon, mais ma mère me manque et son salmorejo me manque. Ici, je combine mon amour pour l'écriture et les saveurs succulentes pour partager des recettes et des histoires de cuisine que j'espère t'inspireront. J'aime la tortilla avec de l'oignon et peu cuite :)

Commentaires

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Bremonde

Enrichissante votre information dont j'ignorais tout ! Les peuplades du nord sont peut-être moins timorées que les peuplades auxquelles nous appartenons ; elles osent autre chose, preuve en est avec ce Musée.
Je ne sais pas si je me rendrai là-bas pour concrétiser l'expérience des odeurs pestilentielles et des petits plats débectants - et pour avoir besoin sans délai du sac à vomi (chacun se connaît, chacun sait ce qu'il peut supporter) - mais l'interrogation "pourquoi est-ce que je trouve ce met inconnu dérangeant alors que je juge délicieux son équivalent, aussi puant mais qui m'est familier ?" j'en ferai part à mes connaissances ... au premier repas que nous partagerons ensemble. Pour les fêtes de fin d'année, tenez ! Histoire de ... mettre les pieds dans le plat des convictions infondées. Merci, nous allons beaucoup discuter, gamberger et rire en pensant à vous !

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